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Napoléon Bonaparte assurait que "c'est avec les hochets qu'on mène les hommes", mais plus d'un a refusé le ruban rouge du prestigieux Ordre de la Légion d'honneur qu'il avait créé en 1802, à l'instar jeudi de l'économiste français Thomas Piketty.
Auteur de l'ouvrage "Le Capital au XXIème siècle" qui connaît un immense retentissement international, l'économiste a déclaré: "Je refuse cette nomination car je ne pense pas que ce soit le rôle d'un gouvernement de décider qui est honorable".
Avant lui, le célèbre auteur de bandes dessinées Jacques Tardi l'avait refusée en 2013, affirmant vouloir "rester un homme libre et ne pas être pris en otage par quelque pouvoir que ce soit".
Les refus de la Légion d'honneur ne sont pas rares.
De La Fayette à Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, de Marie Curie à Brigitte Bardot, de Louis Aragon à Albert Camus ou de Bourvil à Bernard Pivot, des dizaines d'hommes ou femmes de lettres, scientifiques, politiciens, artistes, ou "anars" ont considéré cette "breloque" avec indifférence ou dédain.
Certains s'en sont estimés indignes, plusieurs ont voulu protester contre le pouvoir, d'autres ont affirmé leur opposition de principe ou s'en sont moqué. Georges Brassens en a même fait une chanson. Léo Ferré fustigeait "ce ruban malheureux et rouge comme la honte".
A ceux qui la lui proposaient, l'écrivain Marcel Aymé répondit en 1949, dans un article, qu'ils pouvaient "se la carrer dans le train".
Le compositeur Hector Berlioz, auquel l'Etat voulait payer une messe de Requiem avec le ruban rouge, au lieu de lui verser les 3.000 francs promis, s'écria : "Je me fous de votre croix. Donnez-moi mon argent!"
Le comédien et humoriste Coluche avait prévenu: "Si on voulait me donner la Légion d'honneur, j'irais la chercher en slip pour qu'ils ne sachent pas où la mettre".
D'autres s'indignent de la "désacralisation" d'une distinction, injustement refusée ou distribuée "comme des médailles en chocolat", selon Geneviève de Fontenay, qui présida longtemps le comité des Miss France.
Philippe Séguin, premier Président de la Cour des Comptes, décédé en janvier 2010, ne voulut pas la recevoir, jugeant qu'elle aurait dû revenir à son père, mort en 1944 pour la France.
L'écrivain Bernard Clavel s'estimant indigne de "porter le même ruban que (son) oncle qui avait versé son sang pour son pays", préféra rester "dans le clan de ceux qui l'ont refusée, où, disait-il, je côtoie Berlioz, George Sand, Littré, Courbet, Daumier, Maupassant, Eugène Le Roy et Marcel Aymé".
En 2012, la chercheuse Annie Thébaud-Mony, spécialiste des cancers professionnels, avait refusé cette décoration pour dénoncer l'"indifférence" qui touche la santé au travail et l'impunité des "crimes industriels".
Deux "promus malgré eux" du 14-Juillet 2010, Jacques Bouveresse, titulaire d'une chaire de philosophie au Collège de France, et l'organiste et compositeur Jean Guillou ont décliné sèchement la distinction.
Peu sensibles à cet "accessoire honorifique", ils ont fait savoir qu'ils l'auraient d'autant moins accepté qu'ils ne souhaitaient pas cautionner la politique du gouvernement en matière d'éducation et de culture.
En janvier 2009, les journalistes politiques Françoise Fressoz (Le Monde) et Marie-Eve Malouines (France Info) refusaient la décoration, arguant que "rien dans (leur) parcours professionnel ne justifiait pareille distinction".

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